danièle gibrat
Danièle Gibrat, le calque pour donner à regarder
par Pauline Lisowski
2019
Danièle Gibrat utilise le calque comme support pour réapprendre à lire et à percevoir ce qui nous entoure. A la fois, il cache et révèle. Surface transparente, l’artiste aime sa texture.
«La transparence évite le mensonge», précise l’artiste. Pour elle, l’illusion doit se voir pour inciter le spectateur à faire l’effort du regard. Elle assume ses gestes de plasticienne, des déchirures, des plis, des percées.
L’artiste choisit le calque polyester pour sa douceur, support sur lequel son stylo bille glisse et construit la topographie d’un paysage. Les horizons de montagnes qu’elle dessine se découvrent par strates successives. De ses gestes frénétiques, les lignes se concentrent et structurent un espace, en suspens.
Horitzó : ici, hier, un dessin sur calque face à une chaise convoque la distance et renvoie à l’expérience du temps de la contemplation pour faire surgir les lignes d’un lieu, en mémoire. Cette installation fait écho à la fenêtre, cette ouverture vers le lointain. Les bords du support enroulés suggèrent le processus de construction de l’image.
Avec Horitzó : le seuil, Danièle Gibrat poursuit sa recherche sur la tautologie de l’œuvre, entre matériau, objet et ce qui est représenté. Les feuilles, superposées, prennent appui, par le haut, sur des barres de bois. Début d’un cadre, ces éléments procurent une impression de stabilité par rapport aux feuilles de calque en lévitation. Plis, trous, amènent une vie dans cette œuvre, entre dessin et volume.
Au mur, Horitzó : les points cardinaux se révèle au fur et à mesure du déplacement du spectateur. L’artiste utilise le scotch pour dessiner dans l’espace une œuvre qui se découvre avec la lumière. Par superposition de ce matériau transparent, elle fait apparaître une échelle, un appel vers le haut, vers ce territoire qu’elle n’a de cesse de représenter d’un geste frénétique. A ces côtés, deux paysages sur bois. Elle redécouvre des lignes fluides dans les rainures de ce matériau et les poursuit. Les formes de son paysage, en mémoire, resurgissent alors.
Ainsi, l’image se construit au fur et à mesure de la perception, du décollement couche par couche des feuilles de calque. Les dessins de Danièle Gibrat renvoient à une quête d’un saisissement d’un paysage.
Pauline Lisowski est critique d'art et commissaire d'exposition